Flocons de Pâques

Humeur

Lettre à mon député

 2007-02-22

M. Alain MARTY
Hôtel de Ville
Av. du Gal de Gaulle
57400 SARREBOURG



Langatte, le 2007-02-22


Monsieur,

A l'occasion des voeux du maire de Langatte en janvier 2006 j'avais attiré votre attention sur les dangers de ce qui était alors le projet de loi DADVSI (Droits audio-visuels et droits voisins dans la société de l'information).

Vous avez choisi, malheureusement, de voter ce texte.

Or ses conséquences sont dramatiques pour l'ensemble de la filiaire informatique européenne, dont je suis membre par profession.

La loi DADVSI, parce qu'elle autorise les DRM (systèmes informatiques de gestion des droits), va accroître directement pour moi la difficulté d'exercice et les contraintes juridiques (notamment, mais pas uniquement, un accroissement des coûts d'assurance professionnelle).

L'ensemble de la filière va se trouver fragilisée avec pour conséquence :
- une concentration accrue (disparition des petits acteurs) alors que la profession informatique était jusqu'ici caractérisée par un maillage important du territoire, facteur de vitalité économique et rural ;
- une perte accrue de compétitivité européenne vis à vis de l'Amérique du Nord.

Afin de vous aider à mesurer ce problème, je me permets de vous adresser un article déjà un peu ancien mais qui expose assez justement le problème de fond (les noms des technologies ont partiellement changé depuis, mais leur nature n'a pas changé).

Comme vous le constaterez à sa lecture complète, le problème n'est pas de savoir si quelqu'un pourra ou non, demain, copier le CD de l'association St Ulrich ! Les enjeux économiques pour l'Europe sont d'un tout autre niveau : la survie et le développement de l'industrie informatique en Europe.

Encore pourrait-on louer votre effort pour protéger la propriété intellectuelle, effort que je ne conteste pas. Malheureusement, même pour la profession du spectacle, le remède s'avèrera pire que la mal, puisque la valeur ajoutée résidera bientôt dans les DRMs, faisant de cette profession une dépendance des multi-nationales informatiques (l'article expose très bien ce risque, où une profession se trouve à la merci des prestataires de services ayant la main-mise sur ses moyens de paiement).

Je crains pour ma part que si nos députés persistent à adopter des lois qui militent contre les propres inéterêts économiques de leurs concitoyens, il n'y aura bientôt plus personne pour acheter aucun CD de St Ulrich, protégés ou non ! Le problème de la profession du spectacle n'est pas tant dans les mesures de protection du droit d'auteur que dans une économie dynamique qui permette aux gens d'aller aux spectacles.

Je vous invite donc, lorsque le sujet sera de nouveau débattu à l'Assemblée Nationale, à donner une attention toute différente à ce problème, voir à susciter vous même une re-dicussion de cette loi.

Si vous le souhaitez, j'aurai grand plaisir à vous présenter à mon bureau les progrès qu'ont fait les logiciels libres, où l'Europe est pionnière et possède donc une opportunité de croissance.
Vous même, si vous êtes réélu, bénéficierez à partir de cet été à l'Assemblée Nationale d'ordinateurs basés sur Linux (créé par un finlandais) et d'autres logiciels libres conçus principalement en Europe.
Ma propre activité professionnelle est basée pour plus de 50 % sur une économie logicielle open-source mise en danger par votre loi, et cette part va croissant.

Je profite de cette occasion pour vous rappeler, toujours sur un plan professionnel, que, malgré les promesses reçues successivement par France telecom puis par les collectivités territoriales, le haut-débit n'est toujours pas disponible à Langatte.
Les dernières promesses en date situent "quelque part en 2007" cet accès, sans précision ni sur la date, ni sur le vecteur (probablement le WiFi), nis sur le débit.
Depuis mon installation à Langatte j'ai dû supporter une dépense supplémentaire d'environ 120€/mois pour une liaison Numeris double-canal ne m'assurant qu'un débit de 128Kbs, soit le quart seulement d'une liaison ADSL de base qui, elle, est facturée une trentaine d'euros.
Je me permets d'attirer votre attention sur la fracture numérique qui s'élargit de plus en plus entre les professionnels qui ont fait le choix des zones rurales et ceux qui ont choisi la ville. Cette fracture rend la position de moins en moins tenable, alors que l'informatique et le travail à domicile qu'elle autorise en théorie offrait des opportunités pour les communes rurales. Elle réduit même notre compétitivité sur le plan international puisque le pays possédant la plus forte densité en haut-débit n'est aucun des pays ayant des salaires horaires similaires aux nôtres, mais la Corée du Sud - avec pour résultat que nous devons nous battre en position d'infériorité avec des infrastructures informatiques inférieures, ce qui est tout de même un comble !
J'espère que vous aurez à coeur de faire votre possible pour accélérer l'extension du haut débit à notre commune et, par votre travail de député, à l'ensemble du territoire avec des plans ambitieux pour notre pays.

Je vous prie d'agréer, Monsieur, l'expression de mes salutations distinguées.

 

Suite

Le 21 mai M. Marty a répondu à ce courrier. La réponse est consultable ici (30 ko).
Nous laissons au lecteur le jugement de la réponse.